Transversalité

vendredi 26 juin 2015, par René Barbier

Dimension imaginaire

Ce graphique fut l’un des plus importants de ma carrière universitaire lorsque j’étais très proche de la sociologie institutionnelle. Il date de décembre 1988. Il fait suite aux recherches entreprises durant les années 70-80 dans le cadre de recherches-actions institutionnelles et existentielles. Il reprend la conception de la transversalité à partir de la théorie de l’imaginaire de Cornelius Castoriadis. Cet auteur retient dans sa définition de l’institution comme réseau symbolique socialement sanctionné, deux dimensions fondamentales : une dimension fonctionnelle réelle et une dimension imaginaire. Dans l’approche transversale de l’institution que j’ai élaborée (Anthropos, 1997, 357 pages), la dimension imaginaire se compose de trois zones : une zone pulsionnelle, une zone sociale et une zone sacrale et l’écoute sensible et en tant qu’écoute-action, de l’écoute scientifique-clinique, de l’écoute poétique-existentielle et de l’écoute philosophique-spirituelle.

Dimension fonctionnelle

La seconde dimension est fonctionnelle et se divise en plusieurs champs. Un champ politique, avec son dérivé chimérique souvent à l’oeuvre, un champ poétique plus momentané, avec sa continuité symbolique dans le temps. Le politique est constitué par les normes dominantes et vise à la reproduction de l’ordre institué en liaison avec les forces de domination mais aussi celles de la contestation. Le chimérique nous entraîne vers le leurre et l’illusion pour à la fois nous rassurer (libération dans l’imaginaire) et garantir l’ordre établi par le tenants du pouvoir de domination. Le poétique particulièrement instituant vient déranger l’ordre de la structure. Il constitue souvent la dimension de marginalité difficile mais nécessaire à repérer dans l’institution. Il est important de se donner les moyens de le faire apparaître dans l’analyse de l’institution pour comprendre justement la dynamique de l’instituant sur l’institué.

Dimension existentielle

Le sujet vivra son monde environnant comme espace symbolique c’est à dire espace doté de symboles et de mythes fécondés par la culture de la société considérée en son temps historique. Le poétique et le symbolique, comme le politique et le chimérique, vont constituer la transversalité existentielle localisable pour le chercheur. Elle se manifestera par des produits, des pratiques et des discours renvoyant à des valeurs, des symbole, des mythes, des sources émotionnelles et affectives liées à des sensations et à des pulsions.
Si le politique et le chimérique vont engendrer “l’imaginaire irréel”, mais néanmoins contraignant, de l’institution, le poétique et le symbolique a contrario dynamiseront l’existence institutionnelle par de “l’imaginable” toujours possible sans jamais être annihilé. Le poète, avec René Char, nous affirmera toujours : “À chaque effondrement des preuves/Le poète répond par une salve d’avenir”.
Dès lors, nous définirons la transversalité comme un concept qui tente de définir un ensemble vécu constitué comme une sorte de bain de sens permettant de déterminer des directions de vie et de prendre des décisions. Ce bain de sens est un mixte complexe avec une composante imaginaire à trois dimensions : pulsionnelle, sociale et sacrale. Mais également avec une composante fonctionnelle dont les deux dimensions psychosociales sont le politique et le poétique. En tant que champs structuré, la transversalité comme bain de sens s’organise autour du symbolique et du chimérique, c’est à dire un sens légitime, reconnu socialement, et un sens illégitime, non pertinent dans une culture donnée.