Entretien avec René Barbier, conduit par Anne de Grossouvre
Publié par la revue Alliance pour une Europe des consciences, n°8, Mars/Avril 2006
Anne de Grossouvre : Professeur en sciences de l’éducation à l’Université de Paris VIII, vous y menez un cours inspiré de la philosophie de Krishnamurti. Comment avez-vous été amené à vous intéresser à lui ?
René Barbier : Vers le milieu des années soixante – j’étais encore étudiant – j’ai lu ses livres et, à partir de cette époque, il a été un point de repère très important pour moi. J’ai tout de suite vu que ce qu’il proposait n’était pas une pensée, une systématique, au sens où la philosophie occidentale l’envisage, mais un processus, un regard, essentiellement un questionnement sur la vie. Krishnamurti ne refuse pas la dimension du sacré mais ce qui est sacré, pour lui, fait partie du banal et du quotidien : nul besoin de s’accoutrer pour montrer que l’on est un homme du sacré, à la limite, nul besoin de livres sacrés… Cela me convenait déjà à l’époque même si j’étais encore un peu jeune, et à mesure que j’ai pu approfondir, à la suite d’expériences personnelles, il m’est devenu évident que ce processus passait par un dépouillement, un presque rien, mais que c’est ce presque rien qui fait le tout à fait ! Krishnamurti est mort en 1986, j’aurais donc pu le rencontrer. A l’époque, cependant, j’étais très radical – maintenant je le suis un peu moins et j’ai pris du recul par rapport aux médiations possibles – mais Krishnamurti lui-même était radical à l’égard de toute religion, de tout maître spirituel, et je me suis dit que si je devais croiser sa route, cela se ferait, mais que je ne me rendrais pas à Brockwood, à Saanen ou aux Etats-Unis dans ce but. Je ne l’ai donc jamais rencontré. Mais j’ai continué à étudier sa pensée, seul, avec ma femme ensuite, en élevant aussi notre fille dans cet esprit-là, en écrivant ma thèse d’habilitation et en bâtissant certains de mes cours par la suite. Krishnamurti a été aussi quelqu’un de très important pour moi au moment de certains coups durs dans ma vie où son approche m’a permis d’y voir plus clair.
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