« De la profondeur en éducation. Une écoute sensible », un essai non publié de René Barbier (2008)  

En 2008 René Barbier travaillait à formaliser un essai sur l’éducation, qui restera non publié sous forme papier. Le voici en sa forme initiale, en 166 pages d’une pensée récapitulant et renouvelant de grandes options philosophiques et éducatives qu’il développait depuis de nombreuses années.

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Structure de l’essai en 14 chapitres

Une introduction synthétise la théorie de l’approche transversale et l’écoute sensible
développée par l’auteur à la fin du XXe siècle. Elle constitue la base d’une compréhension en sciences humaines qui se refuse à renier la dimension à la fois mythopoétique et
philosophique de l’existence humaine concrète.

Le chapitre un s’ouvre sur un questionnement concernant une approche d’une philosophie non habituelle en éducation. Peut-on penser un registre philosophique qui relèverait plus de
l’expérience vécue que du simple concept ? Doit-on accepter d’être féconder par des orientations de pensées qui sont propres à d’autres cultures, notamment orientales ? Que dire
d’une attitude « mystique » à l’égard de la vie et comment aborder son langage qui est si souvent codé par la culture dans laquelle elle s’exprime ? (…) Se former existentiellement remet en question les impasses sur lesquelles reposent les bases de notre société. La notion de projet, si prométhéenne, est bousculée. L’Agir sur le monde laisse apparaître sa complexité affective et
s’éloigne d’une conception purement rationnelle et comptable. L’imaginaire devient inévitable. Avec lui, c’est la dimension créatrice et mythopoétique qui s’affirme débouchant sur la notion d’instant poétique comme forme du présent et instance de connaissance de soi. Nous touchons peu à peu les racines de la sagesse comme un des éléments d’une conception tripolaire du sacré, à côté de la religion et de la spiritualité.

Le chapitre deux décrit les deux métaphores, celle de la pierre et celle de l’eau qui nous éclairent sur la dialogique entre les civilisations, mais également sur la manière dont nous donnons du sens au monde, y compris en sciences humaines. Ainsi s’instaure un « principe de sensibilité » nécessaire à la quête de sens. Une médiation en résulte, en fin de compte, à la fois multiréférentielle et acceptant une approche du processus de la complexité de la vie humaine. L’écoute sensible de la pluralité des perspectives, des espaces-temps et des référentiels théoriques en constituent les dimensions les plus significatives.

Le chapitre trois tente une première approche de la notion de Profondeur comme nomination inachevée et imparfaite du Réel. Ce dernier apparaît comme largement inconnu et doté d’un
non-savoir irréductible. La frustration qui en résulte se compense par des aspects magiques ou illusoires mais également par des sublimations plus reconnues socialement. La Profondeur se
donne à voir en général sous l’angle d’une dualité d’éléments en opposition constitutive du « sacré » selon les sociologues des religions. L’être humain paraît souvent porté vers les cimes, comme par un processus psychique radical qui va de pair avec la connaissance par les gouffres.

Le chapitre quatre commence la discussion sur les relations tripolaires entre Profondeur,
Reliance et Gravité, constituant le noyau central d’une philosophie transversale comme art de vivre.. La Profondeur ne s’affirme pas, mais se laisse approcher selon une voie apophatique.
Ce faisant elle instaure la catégorie du Profond, les « dix mille choses » de la pensée chinoise.

Le chapitre cinq s’attache à préciser les deux concepts qui s’articulent logiquement à celui
de Profondeur : le reliance et la Gravité. Au fur et à mesure de la reconnaissance existentielle de la plénitude de la Profondeur par l’être humain, ce dernier se sent de plus en plus relié aux autres, au monde et, en fin de compte, à lui-même. Paradoxalement, en s’approfondissant, il devient plus « grave » mais aussi plus « joyeux » dans un « clair-joyeux » tranquille et souverain.

Le chapitre six décrit les différents chercheurs de sens (de pouvoir, de vérité et d’existence) qui gravitent de près ou de loin, de la Profondeur, de la reliance et de la gravité, en fonction des trois besoins de sécurité, de reconnaissance et de dépassement. Une esquisse d’éléments interconnectés permet d’appréhender un profil d’être humain comme être de sécurité, de pulsions, de dépassement et d’étrangeté.

Le chapitre sept entre dans le vif du sujet par une approche de l’improvisation comme catégorie spécifique de l’imagination active de l’être humain. La Profondeur est source de création non instrumentalisable. Elle engendre en permanence l’improvisation éducative. Elle relève d’une dialogique entre l’imaginaire et le symbolique et engendre ainsi, sans cesse, de la réalité dans laquelle les êtres humains réussissent, tant bien que mal, à communiquer. Elle est essentielle en éducation. Elle permet le regard toujours « neuf » sur la réalité de la classe. Et développe une pensée analogique et l’action pédagogique comme « oeuvre ouverte ». Un exemple, le récit, donne un aperçu de ce que l’improvisation peut produire dans l’enseignement universitaire.

Le chapitre huit nous conduit à reformuler la question « qu’est-ce que la vie ? ». à partir du questionnement sur la Profondeur. De nouveau la notion de Profondeur est remise sur le tapis
pour en montrer le caractère à la fois ambivalent et transparent, que le sujet s’échine à comprendre dans un va et vient incessant entre les extrêmes. Il passe ainsi par quatre
moments : l’homme fermé, l’homme existentiel, l’homme mythopoétique et l’homme noétique.

Le chapitre neuf souligne la transversallité de la compassion au fur et à mesure que l’être
humain découvre de mieux en mieux la « zone ? » (zone d’inconnissance) de la Profondeur. J’appelle « transversalité » toute action matérielle, physique ou symbolique qui traverse et
modifie ce qu’elle touche. La compassion surgit spontanément lorsque nous sommes au plus près de notre être intime qui réalise notre reliance avec le vivant. Pour la comprendre il faut distinguer trois niveaux de réalité. Premier niveau : celui du plaisir/souffrance. Deuxième niveau : celui de la tranquillité d’esprit. Troisième niveau : celui de la Joie/peine. La compassion advient à l’issue d’un voyage intérieur vers une compréhension plus subtile de la Profondeur. On voyage en soi-même en passant par les cinq naissances de l’être humain dans sa nature de Profond qui lui fait découvrir un réenchantement du monde.

Le chapitre dix examine une dimension particulière : l’intuition, en accord par la Reliance. L’intuition prend à bras le corps la question de la temporalité, à partir de la notion d’instant face à la durée. La démarche nous informe sur ce qui nous fonde selon le principe de non séparalibilité constitutif de la Reliance

Le chapitre onze aborde le choc que constitue l’éveil de l’intelligence lorsque nous rencontrons cette « zone ? » de la Profondeur, par une démarche largement non rationnelle. C’est la notion de « flash existentiel » qui est décrite dans ce cas, avec ses caractéristiques d’éclairement et d’instantanéité.

Le chapitre douze nomme le « moment de retournement » qui s’ensuit, après un flash existentiel de grande envergure. Il remet en question le sens de la durée et de l’instant, par la reconnaissance du « moment » et de la « situation », de « l’endroit » et du « lieu ».

Le chapitre treize décrit l’importance du « grand rêve » dans une perspective de connaissance de soi. C’est à travers deux expériences personnelles de « grand rêve » que la thématique est abordée et analysée suivant l’approche transversale et l’écoute sensible.

Le chapitre quatorze nous permet de réfléchir, plus spécifiquement » sur le renouveau pédagogique nécessaire pour entrer dans cette nouvelle façon de penser la Profondeur. La pédagogie de Rudolf Steiner est esquissée comme essai d’un mode d’éducation qui n’élude pas la dimension spirituelle et artistique de l’existence humaine. L’éducateur, parcourant deux pédagogies en permanente dialogique, avec les risques de fixation sur l’un ou l’autre termes en opposition (enracinement ou surgissement) doit réussir un dépassement dans une troisième voie : la pédagogie transversale. Cette voie ouvre l’éducation vers la profondeur par le truchement d’une sagesse en devenir comme source sempiternelle de surprise et d’étonnement devant l’existence symboliquement reconquise.

Une bibliographie termine l’ouvrage.

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