Cornélius Castoriadis, un grand penseur contemporain : une philosophie radicale de l’existence autonome

par René Barbier

Cornelius Castoriadis est décédé en 1997. Il est un des plus grands penseurs politiques du XXe siècle. Nous rééditons, ici, un texte sur ce philosophe dont on commence à évaluer l’importance dans la pensée internationale.

Castoriadis est mort à soixante-quinze ans, il y a huit ans déjà, en décembre 1997 . Je le savais malade et relativement âgé mais son décès m’a touché parce qu’il fut, pour moi, sans être véritablement un intime, un maître à penser. J’ai consacré un chapitre complet à sa théorie de l’imaginaire dans un livre (René Barbier, L’Approche Transversale, l’écoute sensible en sciences humaines, Anthropos, 1997). On sait que Cornelius Castoriadis est le penseur-clé qui a fécondé la théorie de l’analyse institutionnelle. J’ai utilisé sa théorie de l’imaginaire, conjointement à celle de Gilbert Durand, pour analyser l’évolution de l’image de Chinois en Occident.

J’ai eu plusieurs fois l’occasion d’exposer sa vision du monde, notamment dans sa partie la plus ontologique. J’avais beaucoup de questions à cet égard. Sans doute suis-je trop proche d’une conception philosophique orientale pour laquelle, justement, le concept semble  « l’artisan d’une fuite » comme dit Yves Bonnefoy.

J’ai aimé chez Castoriadis le sens de la lutte pour l’autonomie qui conduit au sens de la responsabilité et de l’engagement. Au fil du temps, il a su cerner l’importance d’une écologie politique. Sur le plan éducatif il a bien vu le caractère essentiel de l’amour dans la relation pédagogique et la nécessité de passer par une approche multiréférentielle pour en comprendre la nature profonde.

Quels sont les points que je retiens de sa philosophie de la vie et dont je me suis imprégné dans ma théorie de l’Approche Transversale ?

Pour Castoriadis,  « l’humanité émerge du Chaos, de l’Abîme, du Sans-Fond. Elle en émerge comme psyché : rupture de l’organisation régulée du vivant, flux représentatif/affectif/intentionnel, qui tend à tout rapporter à soi et vit tout comme sens constamment recherché » (Domaines de l’homme. Carrefours du labyrinthe II Seuil, 1986, p. 364). Mais ce Chaos/Abîme/Sans-fond reste toujours présent quoique dissimulé au sein de l’être humain, tant sur le plan de la psyché-soma que sur celui du social-historique. Il demeure son homo demens comme dirait Edgar Morin. Il manifeste sa capacité à s’ouvrir à l’hubris, à la démesure.

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