«  Les Méfaits de l’instruction publique » (1929), un livre un peu oublié de Denis de Rougemont 

Denis de Rougemont (1906-1985), écrivain, penseur et essayiste suisse, fut l’un des grands représentants du courant « personnaliste », ayant  consacré son œuvre à la défense de l’individu libre et responsable face aux puissances de la masse, de la technique et de l’État.

Deux de ses textes sur l’éducation présentés ici (Les Méfaits de l’instruction publique, 1929 et 1972) s’inscrivent dans une réflexion plus vaste sur la condition moderne et sur la manière de réconcilier la culture, la conscience et la vie.

Si on évoque encore souvent Ivan Illich et son livre Une société sans école (titre initial Deschooling society, 1970) qui connut un immense succès dans les années 1970-80, la réflexion de Denis de Rougemont est moins célébrée, même si nombre de ses remarques critiques préfigurent certaines de celles d’Illich, avec une tendance plus affirmée vers le spirituel et le personnalisme.

« Je le disais implicitement. Ivan Illich, aujourd’hui le proclame. Car, écrit-il, « le système scolaire obligatoire représente finalement pour la plupart des hommes une entrave au droit à l’instruction » » (de Rougemont, Suite des méfaits…1972, p.25).

Dans Les Méfaits de l’instruction publique, de Rougemont s’en prend à l’école républicaine et à la notion même d’« instruction publique », accusées de produire des esprits dociles plutôt que des êtres pensants. Se profile un  « État éducateur » tuteur moral des consciences, imposant des programmes impersonnels et des valeurs uniformes.

La véritable éducation ne peut être qu’une « éducation vivante », fondée sur la relation, la responsabilité et l’éveil intérieur. Il convient de redonner à l’acte d’apprendre sa dimension existentielle, d’en faire une aventure personnelle et communautaire plutôt qu’un simple processus d’adaptation. Plaidoyer pour une pédagogie de la liberté : non pas former des fonctionnaires de l’esprit, mais des hommes capables de se connaître, de choisir et d’aimer, dans un monde contemporain où la technique, l’administration, la bureaucratisation, tendent à se substituer à la conscience. En contrepoint est  proposée une éducation comme formation intérieure, à la fois spirituelle et civique, chaque être humain devenant  artisan de sa propre naissance à la pensée.

Lire le texte complet (1929 et 1972) : ICI ou ICI

Pour en savoir davantage sur la pensée de Denis de Rougemont, ce document audio de 1972 (1:25:00) : ICI