Dead Line

par Mariana Thieriot Loisel (Montréal, 28 septembre 2013)

Et si le mot beauté latin  avait son origine dans le mot guerre : Bello ?

Vieil adage : il faut souffrir pour être belle.

Et si elle glissait de l’autre coté du miroir, à l’envers du tableau ?

Quelles combats et quelles grâces l’attendent sur le

Chemin du beau ?

Veni, vici et j’ai perdu la partie. Vouée à un processus de départ et de détachement.

Un corps qui chute mollement sur un champ de bataille enneigé et désert.

Au loin, un point extérieur au décor, un projecteur peut être… Un faisceau de lumière balaye son être et éclaire un magnifique voilier qui surgit de la brume.

Son drapeau est noir.

La nave va.

Fellini a oublié d’éteindre en sortant.

Une ombre s’approche et pose l’évanouie sur sa maison bateau.

Le capitaine navigue dans le brouillard, avec l’accidentée.

La cause de la chute : elle refusait de se battre, elle haïssait  l’esthétique militaire.

Elle respirait une beauté sans non et sans parfum, vide, débarrassée des étendards, des symboles, des idéologies, des étiquettes.

Elle ne s’identifiait à rien ni à personne : elle en est tombée.

Pourtant elle se relève, elle bouge, elle parle, elle écrit. Elle pense même!!

 Son navire est un navire fantôme, le capitaine un personnage venu de si loin pour elle…

Ghosts.

Elle vit dans un mausolée et écrit des tombeaux.

Au loin un passant écoute et transcrit ses rêves.

 Les voitures qui passent dans les rues où elle circule sont des carrosses en argent  feutrés et silencieux.

Elle danse la danse des morts. Elle apprend avec eux. Un arc en ciel les mène jusqu’à sa porte.

Un magicien les habille : en mauve, en gris, en orange ou en noir. Le rouge est un signe de vie : elle s’en méfie. Son cœur dégrisé ose tout juste scander un rythme discret.

Renaitre ? Elle s’y refuse, son insoumission reste sa marque jusque dans l’exil.

Elle cherche Icare désespérément.

Ses bobines de fil sont multicolores, le minotaure dort à ses pieds, apprivoisé. Fatigué d’avoir toujours le mauvais rôle.

Ni Dieux, ni Maitres.

Ailleurs ils sont une légende. Prisonniers de la linéarité de leur histoire.

Morts, ils se retrouvent enfin, apaisés. Délaissés. Elle  berce les personnages dans ses bras.

Ils sont devenus passe muraille, les livres les portent d’un lieu à l’autre. Des hommes, des femmes et des enfants.

Son peuple de papier a posé les lances et porte l’arme à gauche. Il est insaisissable. Son pas est léger,

Son rire lumineux. Il n’a pas de trait définit mais elle les reconnait toujours. Dans toutes les langues: c’est un peuple à venir.

Le capitaine sait qu’il faudra pourtant qu’elle revienne sur terre et renonce à son exil littéraire.

L’échelle est tendue.

A stairway to earth.

Le capitaine lui assure qu’elle ne sera plus jamais seule et que le peuple de papier la portera  tendrement dans les bras vers l’autre rive.

Du bon coté du tableau.

Les ailes d’Icare ne fondront pas,

il vole bas, avec prudence, il a appris à se méfier des pièges ambitieux du raisonnement.

 Ils glisseront d’un battement d’elle, imperceptibles, vers eux-mêmes.

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