À toi, Brindille.
Introduction
Parce que Amour est braises
Et que je le sais
Mon coeur neige
Dans la flamme
RB
1ère Épître aux Corinthiens
Extraits
1Co12.8 A l'un, par l'Esprit, est donné un message de sagesse, à l'autre, un message de connaissance, selon le même Esprit;
1Co12.9 à l'un, dans le même Esprit, c'est la foi; à un autre, dans l'unique Esprit, ce sont des dons de guérison;
1Co12.10 à tel autre, d'opérer des miracles, à tel autre, de prophétiser, à tel autre, de discerner les esprits, à tel autre encore, de parler en langues; enfin, à tel autre, de les interpréter.
***
1Co12.11 Mais tout cela, c'est l'unique et même Esprit
qui le met en oeuvre, accordant à chacun des dons personnels divers,
comme il veut.
***
1Co13.1 Quand je parlerais en langues, celle des hommes et
celles des anges, s'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne,
une cymbale retentissante.
1Co13.2 Quand j'aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et de toute la connaissance, quand j'aurais la foi la plus totale, celle qui transporte les montagnes, s'il me manque l'amour, je ne suis rien.
1Co13.3 Quand je distribuerais tous mes biens aux affamés, quand je livrerais mon corps aux flammes, s'il me manque l'amour, je n'y gagne rien.
1Co13.4 L'amour prend patience, l'amour rend service, il ne jalouse pas, il ne plastronne pas, il ne s'enfle pas d'orgueil,
1Co13.5 il ne fait rien de laid, il ne cherche pas son intérêt, il ne s'irrite pas, il n'entretient pas de rancune,
1Co13.6 il ne se réjouit pas de l'injustice, mais il trouve sa joie dans la vérité.
1Co13.7 Il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il endure tout.
1Co13.8 L'amour ne disparaît jamais. Les prophéties? Elles seront abolies. Les langues? Elles prendront fin. La connaissance? Elle sera abolie.
1Co13.9 Car notre connaissance est limitée et limitée notre prophétie.
1Co13.10 Mais quand viendra la perfection, ce qui est limité
sera aboli.
Dévelopement
"Amour hélant, l'amoureuse viendra, Gloria
de l'été. Ô fruits !"
René Char
Il est venu, il a vu, il a vécu. Peut-être
a-t-il compris ?
Comprendre, prendre avec, c'est dépasser
à la fois la peur de vivre et le désir absolu de vivre. Double
impasse !
Aurait-il vaincu ces deux abîmes de l'existence ?
Derrière eux, le Sans-Fond, comme un écran
aux neiges éternelles.
Jamais je n'ai vu l'amour
dans les barbelés du bruit
Jamais je n'ai fait l'amour
avec les formes invisibles
Nous restons impliqués
par la magie des flaques
Nous n'allons pas boire
la mer dans un verre d'eau
Il ne faut pas pleurer
si la femme est passagère
Ne vient-elle pas de l'espace
où l'éclair est une plume
où l'arbre est une peau
qui grésille
dans l'écarlate
Amour, comment prononcer ce vocable sans trésaillir
? N'est-ce pas un mot à déposer sur le bout de la langue comme
une fraise des bois ? Mot fourmi sur la main d'une enfant sage.
Il a hésité longtemps avant de se risquer
vers cette parole singulière, orchidée de la pensée.
Sans doute n'était-il pas prêt ? Il faut tant d'années
avant d'entrevoir la couleur et surtout l'odeur de menthe de ce sentiment.
Amour, onde et particule, lumière et fruits,
Amour, beauté des ronces et de la tulipe noire,
Si on te prononce, tu exploses !
L'amour à la source
Adolescent, il résidait dans l'amour frondaison.
Il en sentait tous les parfums, toutes les variations de colories, mais, également,
tous les bruissements, tous les arrachements. Le moindre à-coup le
blessait comme une entaille dans un peuplier. La femme présentait
ses étranges miroirs. Il s'y perdait. Sa beauté peuplait ses
rêves. Il suivait sa démarche vers des contrées inconnues.
Tout en lui était volcanique. Pourtant, dans chaque nouvelle éruption,
une voix l'appelait vers le clair-joyeux.
Il a toujours su que le clair-joyeux caresse le sans limite
et s'étaye d'une tranquillité fluide. Mais comment atteindre
le clair-joyeux quand on se complait dans l'éblouissement ? Quand
on regarde de tous les côtés à la fois ?
Dans les premiers moments d'expérience, nous
confondons si bien amour et passion, intensité et bouleversement. L'amour,
c'est du saké. Nous avons besoin de rasades à la Coréenne.
Nous nous croyons invincibles et certains. Rochers dévalant la pente
du petit jour. Une épreuve du feu dans un paysage d'eaux vives. Nous
tenons à l'amour comme un chien à son os. Inutile de nous parler
d'autre chose. De nous inviter à la rencontre avec nous-mêmes.
L'amour est ballon rouge et tout le reste, une lourdeur dont nous voulons
nous délester pour monter vers le ciel.
La jalousie nous guette. La mine flottante flirte aussi avec le navire de guerre. Nous ne sommes pas encore désarmés. Nous n'avons pas encore pris l'eau. À peine avons-nous simplement desserrés un peu les poings. Nous regardons à l'envers, beaucoup trop vers l'intérieur. Dans une forêt, avec l'être aimé, le seul arbre qui existe, c'est elle ou c'est lui ! L'amour rétrécit notre champ de vision, transforme notre réalité en magie silencieuse. Toute pluie est ensoleillée. L'amitié est sous condition. Le travail, un support presque inutile.
Nous parcourons le monde avec les yeux de l'autre métamorphosé.
Tout voyage est à sens unique. Une seule direction : nous deux en équilibre
sur un seul point. Parents, enfants, amis demeurent en filigrane dans le
papier soyeux de notre vie infroissable. Toute contrainte qui nous éloignerait
l'un de l'autre est une avalanche que nous évitons, si possible. Une
unique concession à cet égard : celle qui nous réunit
parce que nous tissons ensemble. Nous sommes du bond, comme dit René
Char, pas "du festin, son épilogue".
Nos couleurs sont le rouge quand il fait sombre et le
bleu quand le jour se lève. Nos parois sont solides, du moins nous
le croyons. Mais elles sont de cristal multicolore, aussi fragile que musical.
Conserver l'oreille du mélomane, jusqu'à la fin, c'est la beauté
de l'amour réalisé. Un mystère, en ces temps de verres
brisés !
Parfois un enfant naît dans ce miracle. Visage minuscule détaché de l'ombre. Une surprise éclatante comme une écaille au bord de l'eau. Un premier pont vers l'ancrage, mais qui le sait ? Ce n'est pas encore l'heure. Nous venons à peine de nous endormir dans la mousse du sous-bois. Il nous faut pourtant laisser le risque de l'étincelle, éviter d'être les pompiers du désir. Attention au carcan du programmable. L'horloger qui compte les heures prend le plaisir de la maîtrise et laisse l'amour toujours inattendu.
Elle se penche sur moi
Le coeur ignorant
Pour voir si je l'aime
Elle a confiance elle oublie
Sous les nuages de ses paupières
Sa tête s'endort dans mes mains
Où sommes-nous
…
Paul Éluard
Extrait de L'amour la poésie, 1929
L'amour entre deux rives
Pendant des années, il a vécu entre deux
rives.
C'était du temps où l'Histoire semblait se
désensabler. L'événement effilochait la morosité.
Le rire reprenait sa place dans l'arc-en-ciel. La parole était un panier
de cerises.
Il aimait cet écart. Un entre-deux qui interroge
le stable et le mouvant. Un espace flottant aussi léger qu'une mantille.
Les rives changeaient mais la distance demeurait, presque
parfaite.
Un jour il a voulu s'établir sur une rive très
abrupte. Mais il a trop attendu. La nuit était si rapide. Elle n'a
pas su lui dire "viens!", il n'a pas pu lui dire "oui!". C'est l'entre-deux
qui l'a empoigné. Une blessure au-delà du cœur.
Elle était faite de la souche des grands fonds.
Souvent elle surgissait avec le vent du large, immergée dans sa beauté.
Terrifiante, dans son ivresse rocailleuse.
Ses amis avaient peur de son énergie.
Rien ne l'arrêtait, pas même la peur de mourir.
Un jour, elle a nagé jusqu'au racines de la mémoire.
Là, elle a vu une page blanche. Tout restait à écrire.
Le bleu de ses yeux portaient l'ombre d'un village englouti.
Lui seul connaissait sa fragilité de coquelicot.
Elle ne voulait rien parce qu'elle demandait tout.
Elle laissait partir ceux qui souhaitaient changer de
nuits.
Il se souvient de sa silhouette jetée au dessus
du passé. Il revoit encore son élan, cette estafilade sur l'avenir.
Elle était zigzag. Elle était un coup de
crayon de couleur rageur d'un enfant triste.
Elle renversait toutes les barques. Elle emplissait toutes
les langues.
Avec elle, il faillit perdre sa propre voix. Il entendit
battre son cœur. Il se redressa. Il vit le large à l'intérieur
de lui-même.
Elle s'est mariée dans une obscure province.
Il est resté debout, en équilibre, sur la
Tour Eiffel.
Un soir, il crut l'apercevoir, au loin. Il tressaillit.
Ce n'était que le minuscule incendie que crée
la lanterne d'un voilier sur une mer presqu'en deuil.
L'amour au milieu du fleuve
Arrivé au milieu du fleuve, quel âge avons-nous
? Qui peut le dire, tant chaque destinée est singulière, faite
de bois pur ; chaque épreuve sentimentale, une toile d'araignée
dans la rosée ou dans l'incendie. Le temps n'avance pas comme un train
de première classe. Il est lièvre ou tortue pour chacun d'entre
nous. L'événement est ce taureau sauvage que seuls, quelques
uns, savent attraper au lasso. Beaucoup succombent à ce petit jeu
et passent à côté de leur vie.
L'amour au milieu du fleuve se fait péniche rassurante.
Qui pourrait penser qu'un tel bateau puisse couler ? Il ne va plus aussi
vite que cette bouée qui dévalait les torrents en amont. Il
transporte tant de lourds soucis, tant de tragédies quotidiennes.
L'homme qui a bien vécu dans ses sources peut apprécier le
paysage sans remords. Il sait d'ailleurs que rien n'est vraiment stable, pas
même la paresse du vent léger dans les feuillages. Dans son
regard vers le fleuve, il voit se miroiter son visage d'enfant. Qui peut
dire si un simple reflet, un instant, ne transformera pas de nouveau son
existence ? Rien de moins assuré qu'un homme dans cet espace-temps.
Est-il célibataire ou vit-il avec l'étrangeté d'un ou
d'une autre ?
Ton rire grand aigle blanc
à
R.
Aujourd'hui j'ai touché les ailes de ton rire
Ton rire grand aigle blanc au dessus des saisons
Avec sa flèche d'ombre où grésille
le vent
Ton rire où se détachent rageuses
tes frondaisons
Aujourd'hui j'ai connu tes espaces crépus
D'un trait je fus noyé dans ton doux cresson
bleu
J'ai suivi la coulée j'ai compris l'infini
et dans ton sexe indien le serpent de lumière
Aujourd'hui j'ai atteint ton rire du bout du monde
Ton rire grand aigle blanc qui émiette la peur
Ton rire de corsaire sur l'écorce d'un mot
J'ai mordu dans la page l'étrange douceur d'aimer
Aujourd'hui je ne sais si ton rire est mirage
car son reflet griffu retrace ma ligne de vie
Ton rire cadran solaire entre cascade et rive
Ton rire dans la jachère d'une eau presqu'évanouie
Aujourd'hui je répands ma cargaison d'iris
sur le nid de ton rire où mort se déshabille
Je peux te dire un rien d'incendie dans la vague
Je ne sais si ravine a plus haute ramille
Aujourd'hui je reviens de ton rêve endormi
à cheval sur ton rire déployant son refrain
Je descends dans ton corps sans liane et sans effort
Je te remets la clé qui ouvre le passage
Nous partons tous les deux ton rire et mon poème
pour découvrir là-bas l'envers du paysage
Pic le bout de ton sein enneigé par mes lèvres
Vive et si flamboyante la source de ton ventre
Aujourd'hui j'ai vécu l'année dans
une seconde
Ton rire grand aigle blanc a saisi la fourrure
des mots qui blondissaient aux pentes de mes jours
Je ne sais si soleil je ne sais si capture
Mais je tombe vertical dans le chaudron stellaire
Ton rire qui m'accompagne d'une plume sans détour
Ton rire comme une bolée de nuit et de plein
sud
pour étancher ma soif toujours plus radicale
Aujourd'hui je laisse faire le jeu fou des ciseaux
Je dérive détaché loin des rumeurs
pointues
Je suis dans l'ici-monde la graine et la rivière
Ton rire mène à la proue d'un aigle si
feuillu
Je marche comme un enfant sur le feu de la rose
Jamais je n'ai dansé ainsi sur l'angle aigu
Je contemple la pierre où la mer se repose
Je dévalise le sens le nom même de l'amour
Je ne sais si poème et je ne sais si prose
Ton rire grand aigle blanc m'a coiffé de bonjours
J'écartèle le Rien et découvre
le Pour
Je fais bleuir mes mots sous ton plus chaud pelage
Laisse-moi revenir dans la plaine de mon âge
Rire Ouvre tes serres je suis en plein été
Plonge dans mon coeur et saisis ta becquée
Rire je suis à toi Rencontre mon Grand Bleu
À force, ils se sont entendus. Dans le meilleur
des cas, peut-être, compris.
Qu'est-ce qu'écouter en amour ?
Sans doute prendre le temps d'un regard sur l'abîme
d'un silence qui ne trouvera jamais son mot pour le dire.
Sans doute une caresse au moment où l'on ne l'attend
pas. `
Sans doute un sourire dentelé par la tendresse.
Un jour, elle a contemplé l'univers et il n'était
pas avec elle, seulement à deux pas. Écouter la solitude qui
jaillit du véritable amour partagé. Sans elle, nous ne
sommes rien, nous ne nous connaîtrons jamais. La solitude est le véritable
château du sage. Au milieu du fleuve, déjà, nous en percevons
toute sa rigueur et toute sa plénitude. Plus tard, nous saurons qu'elle
est plus bouleversante et plus joyeuse encore.
Quelle tragédie quand la vie s'arrête brusquement, au milieu du fleuve.
Un jour, il a suffi d'une minute. Elle est tombée
sans un bruit.
Devant lui un corps sans vie, des yeux qui restent murés
dans l'immobile. Christian Bobin, lui aussi, se souvient de "la plus que
vive" dont l'incandescence vitale vient de jeter ses dernières étincelles
; Paul Éluard, à la mort de sa femme Nush, écrit "Nous
ne vieillirons pas ensemble/ le temps déborde".
On ne sait jamais ce qu'il faut faire ni ce qu'il faut
dire devant la mort.
Nulle expérience passée ne nous renseigne.
Nous sommes toujours innocents face à l'impromptu
de la mort. Tous les discours philosophiques paraissent de trop ou à
côté. La poésie, seulement, constitue la dernière
trame possible pour inscrire notre douleur et notre incompréhension.
Il lui a fallu du temps pour accepter réellement. Sans doute croyait-il que sa sagesse le sauverait plus vite. Erreur et présomption ! La sensibilité, lorsqu'elle est brusquement incendiée, ne connaît aucune eau miraculeuse, fût-elle issue des mains de Marc-Aurèle. Lui n'avait pas la chance ou l'illusion de croire aux pouvoirs des statues qui peuplent les églises du monde.
La mort noire est totale. Un flux mazouté.
Une plongée dans le Chaos.
Une lame de couteau au cœur de l'élan.
Aucun oiseau - ici - ne peut sauver sa blancheur
d'aile.
Le non-sens devient la Grande Muraille infranchissable.
Inutile d'aller chercher du secours. Tout est à faire soi-même,
au risque d'en finir.
Krishnamurti l'a compris. Dix jours pour faire le deuil
de la mort de son frère Nitya. Dix jours d'inespérance radicale
et de folie délestée. Dix jours à retrouver soudain
le langage de la Terre-mère, oublié depuis si longtemps. Dix
jours pour se regarder en face, comme un être humain sans entrave, sans
projet mais non sans infini.
Pour lui, il a fallu presque cent fois dix jours pour laisser
fondre dans sa mémoire le visage d'Agnès. Aujourd'hui, une
eau claire s'écoule, avec parfois un reflet étrange qui vient
du ciel.
Une femme l'a aidé, superbe et sacrifiée,
bien sûr, comme un nuage qui passe avant l'été,
au dessus d'une montagne écroulée.
Elle ne connaîtra jamais toute sa reconnaissance.
Un jour, on s'aperçoit qu'on a vieilli. Ce n'est
pas seulement à cause des cheveux blancs qui tombent sur les rondeurs
du corps. Non, c'est une petite musique qui murmure dans les veines. Une légère
tristesse dans le regard quand vient la nuit. Une paresse à saisir
l'oiseau en vol. Une main qui tremble un peu sur le clavier d'un accordéon.
Le cœur qui chancelle un tantinet en haut du chemin. Le nom qui s'est perdu
dans les recoins feuillus de la mémoire.
Il ne fait pas partie de ceux qui cajolent leur corps comme
une miniature chinoise. Il en prend soin à sa juste mesure, mais sans
excès. Il accepte que son corps vieillisse dans l'épaisseur
des années. Un moment, il a même cru que son corps avait rendu
grâce et que sa sexualité s'était définitivement
consumée à la vitesse d'une feuille de papier de soie. Il avait
fait son deuil de ce plaisir évident. N'avait-il pas vécu dans
la plénitude sans grillage de ses envies ?
Aujourd'hui, il sait que tout renoncement porte son miroir
d'illusions. Rien n'est jamais perdu, seulement on ne sait pas toujours "voir"
ce dont il s'agit. Un manque à être. Une épine dans le
regard. Une lucidité trop tranchante.
Mais, surtout, une imperceptible distance qui s'introduit
subrepticement dans la relation amoureuse et qui la mine en profondeur. Un
jour, elle a dit un mot de trop. Un autre jour, il l'a regardée sans
la voir. Tout à coup, le désir disparaît comme il était
venu. Reste l'étonnement de demeurer encore ensemble, pour crever
d'un coup d'ongle, une baudruche nommée solitude.
Pourtant, il ne faudrait jamais croire à l'impossible.
La preuve !
Elle est venue comme un myosotis sur un éléphant.
Une rencontre inespérée avec Brindille. Une racine découverte
dans du sable mouvant.
Oeuvre de Silvaine Arabo
Brindille
Elle sort de ma mémoire
Fraise des bois ou brindille
Elle a la forme d’une écorce
Elle a la douceur du velours
D’où vient-elle vraiment
Avec ses hirondelles
Pourquoi prend-elle la nuit
Comme une éponge
Nous sommes issus de l’espace
Dit-elle mais le sais-tu
Je la regarde naître
Dans sa nudité sidérale
Si je la touche je m’évanouis
Dans sa beauté sans rivage
Suis-je donc en plein été
Dans ses bras de lavandes fraîches
Jamais je n’ai vu une forme si parfaite
Elle est l’harmonie même
Je respire son nom
Je caresse les paysages de son corps
Ses mots sont mes papillons
Ses lèvres ma neige au repos
Je l’aime car les arbres poussent
dans nos mains
Je l’aime car tout disparaît
à l’horizon
Nous entrons dans le sans-âge
par la porte de sortie
Nous sommes à l’orée du Sans-Fond
Comment l’appelle-t-on
Bonté et Beauté`
Deux joyaux pour l’éveil au petit matin
Un jour tu comprendras me dit-elle
Sait-elle qu’il me suffit de fermer les yeux
pour naître avec ses yeux
pour respirer avec son corps
A chaque instant je la connais depuis mille ans
Mais nous nous inventons dans un seul cri
Qui ressemble à une prairie de coquelicots
Nous voyageons du même élan
dans la tendre preuve de la différence